« - Jade, tu n'as pas l'air bien depuis que tu es arrivée...
- Ne t'inquiètes pas, tout va bien ! Je suis juste un peu fatiguée. »

Je passais l'après-midi avec mon meilleur ami, comme nous en avions l'habitude une fois par semaine. Il avait toujours été le seul homme en qui j'avais une confiance absolue, ce qui était plutôt exceptionnel depuis l'accident, il faut le dire. Néanmoins, il avait raison, je n'étais pas dans mon assiette. Depuis que j'étais arrivée au centre commercial, j'entendais des voix dans ma tête, ce qui me perturbait énormément. Pire que cela, ce n'était que des voix masculines qui changeaient toutes les trente secondes pour dire des choses plus bizarres les unes que les autres. Comment vouliez-vous que je me concentre sur les vêtements que je devais acheter en étant plusieurs dans ma tête ?

Ce n'était pas la première fois que j'avais ce genre d'hallucination et à vrai dire, je commençais vraiment à me demander pourquoi cela m'arrivait. J'étais persuadée d'être folle, ou schizophrène. Tout cela est forcément le fruit de mon imagination, une simple conséquence du viol que j'ai subi étant plus jeune. Je pensais m'en être remise mais il semblerait que non vu ce qu'il m'arrivait. J'avais à plusieurs reprises pensé à consulter un psychologue mais la peur de me retrouver en asile psychiatrique m'en empêchait royalement. De plus, il m'était très difficile de parler de l'accident. Je préférais largement garder tout cela pour moi, dans un coin de ma tête et de toute façon, ces hallucinations finiraient par passer à un moment ou à un autre, quand j'aurais enfin réussi à tourner la page.

Une nouvelle voix fit surface dans ma tête. Comme d'habitude, je me figeais sur place pendant quelques secondes, devenant totalement immobile. Cela devait paraître étrange à mon ami qui ne savait rien de ce qui m'arrivait. Le problème avec ces hallucinations, c'est que je ne pouvais pas du tout les contrôler. Elles arrivaient comme par magie, à des moments totalement différents d'une fois sur l'autre. Les seuls moments où tout allait à peu près bien, c'est lorsque j'étais seule chez moi. J'avais tout de même remarqué que plus j'étais stressée, plus cela empirait et plus j'entendais de voix, ce qui me faisait encore plus peur et me stressait encore plus naturellement. Un vrai cercle vicieux ! Quelques secondes plus tard, je secouais la tête, essayant ainsi de remettre mes idées en place, ce qui eu très peu de succès.

Si je me rappelais bien, tout cela a commencé quelques jours après que je sois allé dans cette maison de somnolence. Ce devait être il y a quatre mois, deux mois après que j'ai commencé à travailler pour NWO. J'étais tellement fatiguée à force de me donner à fond pour ce nouveau travail que j'en avais complétement perdu le sommeil. Voyant des pubs pour les maisons de somnolence à la télévision, j'avais immédiatement décidé de tester, me disant que c'était la seule solution vu que je ne pouvais pas prendre de jours de congés. J'y avais été un samedi après-midi, pendant mon weekend. Tout avait été très vite et dès les semaines qui suivirent, cela me fit un bien fou. J'avais retrouvé le sommeil réparateur qui me manquait temps.

Je ne me suis jamais dit que ces pensées bizarres pouvaient me venir de là mais pour moi, cela a tout de même un rapport. En effet, si c'est apparu en même temps, c'est tout de même qu'il y a une raison non ? Je suis persuadée que Dieu a voulu me punir en me donnant ces pensées contre du sommeil. J'ai osé contrer les lois de la nature en ayant recours à cette thérapie dans la maison de somnolence, ce qui est complétement contre la religion et il a voulu me punir, c'est sûr. Inutile de vous dire que je suis incapable de localiser les voix autre part que dans ma tête, même s'il faut avouer que de temps en temps, je me demandais si je n'imaginais pas les pensées des hommes que je croisais. Oui, il arrivait qu'elles leur correspondent parfaitement étrangement. Qu'est-ce que je vais faire ? Je ne vais vraiment pas bien...

Psychologie/Caractère : Les gens disent souvent que je suis une battante, que j'ai peur de rien et que je sais toujours ce que je veux. Pourtant, ce n'est pas vraiment comme cela que je me décrirais. En effet, rare sont les gens à qui je révèle mon véritable caractère car ce que l'on voit de moi n'est qu'une image, une carapace. En réalité, je suis juste une fille comme les autres qui essayent d'être heureuse au maximum, même si je suis persuadée que le bonheur n'est pas quelque chose que l'on peut trouvé mais plutôt quelque chose qui nous tombe dessus quand on est au plus profond du gouffre qu'est notre vie. On cherche tous notre chemin, même si certains le montrent plus que d'autres. Enfin, vu que personne ne se soucie de mon bien-être intérieur, laissons le de côté. Je vais plutôt vous parler de ce que tout le monde connait sur moi. Comme je vous disais plus haut, j'apparais comme la fille sans problème, qui s'est battue pour la place qu'elle occupe, qui se bat pour la garder et surtout qui fera tout pour monter les échelons. Je ne suis pas faite pour le métier que je fais mais tant pis, on me l'a proposé et je fais avec. Ça paye bien, c'est le principal et c'est ce que j'ai toujours voulu. Ce qui fait ma spécialité, c'est sans doute aussi la façon dont j'assume ma sexualité. Même si je la cache à mes parents qui risqueraient de faire une crise cardiaque s'ils l'apprenaient, je n'ai jamais hésité à me balader aux bras d'une charmante demoiselle et le fait d'embrasser des filles en public ne me dérange pas du tout. Je n'ai jamais eu honte de ce que je suis, et si je cache tout de même des choses à certaines personnes, c'est juste pour les préserver elles et non moi. Voilà, vous avez vu que je n'ai rien de plus que les autres filles. Je suis honnête avec les gens la plupart du temps. Je ris aux blagues qu'on me sort et je fais même un peu d'humour de temps en temps. Je fais rarement de faux pas et je me contente d'obéir aux ordres. Je reste à ma place tout simplement, même s'il faut avouer que je suis tout de même du genre curieuse et fouineuse. Je bavarde beaucoup aussi, ce qui est d'ailleurs un point qui ne facilite pas toujours mon intégration. J'aime parler pour ne rien dire, quitte à parler toute seule si personne ne me répond. Je n'ai pas peur du ridicule, loin de là. Cela n'a jamais tué personne alors ça ne me fera pas mourir !

Morphologie : Je n'aime pas me décrire. J'ai toujours trouvé que cela faisait vantard. Comment quelqu'un peut-il arriver à dire « Je suis beau » ? Personnellement, je n'y arrives pas ! Je ne dirais pas que je suis moche, loin de là, parce que je m'aime bien quand même mais de là à dire que je suis belle. Il y a une certaine marge à respecter. Je dirais tout simplement que je suis dans la moyenne. J'aime dire que j'ai du charme parce que selon moi, c'est ça qui fait qu'on plait ou non aux autres. Du charisme aussi c'est utile. Pour vous faire un court résumé sur mon physique, il faudrait tout simplement que je vous montre une photographie. C'est tellement plus facile de montrer une photo. C'est à la fois plus visuel pour vous et cela demande moins d'efforts pour moi, donc au final tout le monde est gagnant. Si vous aviez cette fameuse photo, vous verriez avant tout mes longs cheveux bruns. Ils sont imposants malgré le fait qu'ils ne soient ni frisés ni volumineux. Ils sont juste longs et lisses, comme beaucoup rêvent d'avoir. Ensuite, vous remarqueriez sans doute mes yeux. Ils sont tantôt verts, tantôt marrons, suivant s'il pleut ou non. Je trouve ça assez drôle d'avoir des yeux qui changent de couleur d'ailleurs. C'est original quoi et d'ailleurs, on me l'a souvent envié mais qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse ? J'ai de la chance, je n'ai jamais eu besoin de lunettes contrairement aux trois quarts de ma famille. J'ai souvent imaginé ma tête avec des lunettes mais croyez-moi, je me suis fait peur toute seule ! Il paraît que j'ai des pommettes roses quand je ris mais je ne l'ai jamais remarqué alors je ne pourrais pas vous dire si c'est vrai ou non. A part ça, j'ai une petite bouche et un petit nez, rien de bien extraordinaire. En même temps, je suis petite donc c'est normal que le reste soit petit aussi. Je ne suis pas bien grosse non plus mais il faut dire que j'ai horreur de prendre le moindre kilo alors je fais du sport comme pas deux. Pourtant, dieu sait que je mange comme quatre... C'est étrange d'ailleurs ! La prochaine fois, je penserais à amener cette fichue photo, ce sera tout de même plus facile...

Style vestimentaire : Pour faire simple, je m'habille avec le premier truc qui me passe sous la main quand je la fourres dans ma grande armoire. Cela peut vous paraitre étrange venant d'une fille et pourtant, je suis loin de me soucier de mon apparence. Je ne suis pas ce genre de fille qui passe une heure devant son miroir à se maquiller. J'aime rester naturelle, même si pour les besoins de mon travail, je prends tout de même soin de m'appliquer une couche de fond de teint et un peu de mascara et de fard à paupières. Rien de trop extravagant, juste le strict minimum. Pour mes vêtements, je fais exactement la même chose. Enfin, je n'ai jamais dit que je m'habillais mal, rassurez vous parce que oui, j'aime les belles choses, les beaux vêtements en particulier. Et quand je vais faire les magasins, j'en ai souvent pour plus de cents euros, comme toutes les demoiselles de mon âge. J'achète uniquement des beaux habits et après, comme ça, je n'ai plus qu'à choisir en deux temps trois mouvements le matin. Dans tous les cas, je sais que je porterais quelque chose dans lequel je me sentirais à l'aise et c'est quand même le principal ! Souvent, vous me verrez en robe légère car je ne suis pas frileuse. Je ne suis pas fan des jupes par contre alors je les évite au maximum. Néanmoins, pour le boulot, il faut que je portes des pantalons et dans ces cas là, j'opte pour des jeans tout simplement avec un petit haut et le tour est joué. Pourquoi se compliquer la vie quand on peut faire simple ?

Maladie/allergie : Vous allez rire mais les hôpitaux me sont assez familier. En effet, lorsque j'étais petite, j'étais du genre à toujours avoir quelque chose de casser ou d'égratigner. Lorsque ce n'était pas le poignet de cassé, c'était une entorse à la cheville, ou encore l'appendicite qui me prenait... Pourtant, Dieu sait que mes parents sont allergiques à ce genre de pôle médical avec leur religion. C'était par obligation qu'ils m'y emmenaient car s'ils avaient pu me guérir seuls, ils l'auraient sans aucun doute fait. Ils ne croient que en la guérison de Dieu et pour eux, tout ce qui est scientifique est faux. J'ai en partie cette croyance vu que j'ai été élevé de cette manière mais je vous avouerais tout de même que j'ai souvent loué le fait qu'il y avait des hôpitaux car sans eux, je ne sais pas ce que je serais devenue, sans doute une femme pleine de cicatrices alors que là, il ne me reste que quelques petites marques. Je ne sais pas comment j'arrivais à me faire tout cela, sans doute que j'étais un peu trop speed à vouloir courir partout et à tomber. On dit souvent que c'est dû à des chaussures trop grandes mais je pense plutôt que je ne faisais pas très attention. Enfin, en grandissant et en entrant au lycée notamment, j'ai appris à faire plus attention justement et au fil du temps, j'ai de moins en moins été dans les hôpitaux. Néanmoins, malgré cette frénésie blessante, je n'étais que très rarement malade, disposant d'un système immunitaire assez efficace. Le seul problème était cependant que quand je tombais réellement malade, ce n'était pas pour faire semblant et pour vous dire, c'était souvent deux à trois maladies différentes que j'attrapais en même temps. La simple angine, moi je ne connais pas....

La première chose que l'on peut dire sur ma famille est qu'elle est très portée sur la religion, chose qu'elle respecte et pratique chaque jour. Pourtant, cela n'a pas toujours été le cas voyez-vous, car l'union de mes parents n'aurait jamais dû voir le jour. C'est dans le salon de couture où ma mère travaillait qu'ils se sont rencontrés un beau matin de novembre, alors qu'il pleuvait averse dehors. C'était il y a 28 ans, 4 ans avant ma naissance. Mon père avait amené un pull, son pull préféré qu'il avait malheureusement décousu au niveau du coude. Ma mère n'avait pas vraiment le temps de s'occuper d'une nouvelle commande avec tout ce qu'elle avait déjà à faire, mais devant l'insistance de l'homme, elle finit par céder. Après tout, ceci ne lui prendrait pas plus d'une heure. Elle lui demanda de repasser prendre le vêtement deux jours plus tard, ce qu'il fit. Pour la remercier, il lui amena d'ailleurs un bouquet de 9 roses, nombre qui symbolisait le jour de leur rencontre. La femme fut touchée et le gratifia d'un large sourire, lui indiquant que s'il avait une nouvelle fois besoin de ses services, il savait où la trouver. Et ainsi, l'homme revint toutes les deux semaines avec un nouvel habit à réparer. On pouvait facilement remarquer que c'était fait exprès car il avait simplement envie de revoir la belle couturière mais celle-ci ne dit rien, se contentant de réparer et d'être flattée par les compliments qui lui étaient adressés. Au bout de six mois à jouer à ce petit jeu, mon père demanda enfin à cette femme qui lui plaisait tant d'aller au restaurant avec lui. Bien sûr, il avait réservé une table dans le meilleur des restaurants de Londres, malgré son petit salaire. Elle fut séduite et accepta bien volontiers. C'est ainsi qu'eut lieu le premier rendez-vous, qui se poursuivit par plusieurs autres au cours desquels les deux jeunes personnes faisaient plus ample connaissance. C'est lorsque mon père voulu embrasser ma mère, après le cinquième rendez-vous qu'elle se braqua, ne voulant plus le voir. En effet, sa famille était une des plus religieuses de sa petite ville et il était interdit de faire la moindre chose avant le mariage. Elle avait déjà pris de gros risques au niveau de ses parents en allant flirter avec un homme qu'ils n'avaient pas choisi alors elle préféra mettre un terme à tout cela. Elle ne s'attendait cependant pas à la motivation du jeune homme qui ne comptait pas la laisser partir comme cela sans explications. Il revint plusieurs fois au salon de couture, demandant ces fameuses explications. Il se prit de nombreux vents mais revenait à chaque fois. C'est au bout de deux nouveaux mois que la jeune femme craqua enfin, expliquant toute la situation à l'homme, de sa famille qui n'approuverait jamais leur liaison à l'homme qu'elle avait promis d'épouser un an plus tôt et qu'elle ne connaissait même pas encore. Elle était des plus malheureuse car elle aimait cet homme qu'elle ne connaissait pourtant que de par leurs rendez-vous. Elle était tombée sous son charme à force qu'il vienne la voir. L'homme tomba de haut, lui expliquant qu'elle pouvait lâcher sa famille, qu'il était là pour elle, mais jamais elle ne pourrait le faire. Il ne lui restait qu'une solution, aller voir le père de cette dernière, ce qu'il fit quelques semaines plus tard. Le vieil homme lui rigola à la figure, expliquant qu'il ne laisserait jamais sa chère fille épouser un homme qui n'était pas religieux et qui n'avait pas de moyens. Elle était promise à un riche héritier de leur paroisse, ce qui serait largement un meilleur parti pour elle. Il lui lança néanmoins en riant : « Si tu arrives à me prouver que tu peux être aussi bien que son fiancé avant le mariage, je te donnerais peut-être une chance. » Il n'était pas sérieux mais mon père le pris néanmoins comme tel. Vous commencez à vous dire que cela ressemble de plus en plus à un conte pour enfants. C'est ce que j'ai cru aussi quand on me l'a raconté et pourtant, c'est la stricte vérité. Suite à cet entretien, mon père entama un changement de vie radicale, n'oubliant cependant pas d'aller voir sa belle une fois par semaine dans son salon. Il lui promit qu'il ferait tout pour qu'ils soient ensemble. Il se mit à fréquenter l'église tous les dimanches, chance pour lui, il était déjà baptisé et se consacra à la religion, même s'il n'y croyait guère. Il voulait montrer à son futur beau-père qu'il en était capable. Il trouva également un autre travail, beaucoup mieux payé, même si cela nuisait à ses rêves de vie de bohème. Il devint alors le gendre parfait au bout d'un an. Cela lui prit du temps mais ça en valait la peine selon lui. Le mariage était annoncé pour dans deux mois. Il alla donc rendre visite de nouveau au père de la jeune femme qui fut étonné de revoir cet homme. Un long dialogue eut lieu. Je ne saurais pas vous dire ce qui a été dit vu que l'on a jamais voulu me le raconter mais au final, mon père a réussi à obtenir ce qu'il voulait. La date du mariage ne serait pas modifié mais ce serait son mariage à lui. Il n'avait plus qu'à annoncer la nouvelle à ma mère et deux mois plus tard, ils se marièrent, deux ans après leur première rencontre environ.

A partir de leur mariage, mes parents purent enfin aménager ensemble mais mon père dû continuer ses efforts au niveau de la religion pour montrer qu'il restait à la hauteur. Au fil du temps, cela devint presque naturel pour lui et il finit même par y croire. De toute façon, il aurait tout fait pour ma mère, même si son nouveau travail lui prenait les trois quarts de son temps. Au bout d'un an, mon grand-père lui fit de nouveau comprendre que s'il voulait rester avec ma mère, il allait falloir qu'il leur donne un descendant. En effet, ma mère était fille unique et il serait totalement inacceptable qu'il n'ait pas d'héritier. Mes parents commencèrent alors à essayer de faire des enfants. Cela mis du temps, presque un an avant que ma mère ne tombe enceinte. Ils attendirent la période fatidique des trois mois avant de l'annoncer officiellement et mon grand-père fut enfin satisfait, même s'il déchanta rapidement deux mois plus tard quand il apprit que ce serait une fille et non un garçon, à croire qu'ils n'arrivaient pas à faire de garçons dans sa famille. S'il avait appris à cette date que je ne ferais sans doute jamais d'enfants vu ma sexualité... La grossesse se passa normalement, même si ma mère dut rester allongée durant le dernier mois. Néanmoins, l'accouchement se déroula avec beaucoup plus de difficulté et ma mère tomba même dans le coma pendant près d'un mois. Mon père fut exemplaire pendant cette période, s'occupant de moi du mieux qu'il pouvait entre son travail. Ma mère revint rapidement à la maison après son passage en coma et ils purent enfin commencer à être heureux dans leur ménage à trois. Je ne m'en rappelles pas mais je suis sûre qu'ils m'ont couvé comme pas possible, m'emmenant même à l'église avec eux tous les dimanches. Dès mon plus jeune âge, j'ai été éduqué dans la religion. Après tout, mon père n'avait pas fait autant d'efforts pour lâcher maintenant, surtout que mon grand-père n'avait toujours pas confiance en lui, même après tout ce temps. Néanmoins, quand j'étais seule avec mon père, il n'hésitait pas à me raconter des histoires de sa vie non religieuse, me disant que quand je serais grande, je pourrais choisir ma manière de vivre. Il aurait voulu m'enseigner d'autres valeurs que celles qui n'étaient pas les siennes mais tenant trop à ma mère, il ne tenait pas à prendre ces risques. Oui, ça vous pouvez être sûr que mes parents s'aimaient plus que tout... Je commençais bientôt à faire mes premiers pas, à dire mes premiers mots, comme tous les enfants de mon âge. Ma mère avait engagé une nourrice pour s'occuper de moi pendant qu'elle reprenait tranquillement son travail de couturière. Elle avait installé son salon à la maison, dans une petite pièce à part mais ses anciens clients étaient restés des fidèles. Après tout, elle avait une sacrée réputation dans son domaine. De cette manière, elle pouvait garder un œil sur moi et gagner de l'argent, ce qui lui convenait parfaitement. Je commençais l'école à l'âge de trois ans, dans un établissement privé où les préceptes religieux étaient respectés bien sûr. Tous les autres enfants étaient comme moi, et le fait que ce soit privé permettait que ce soit également beaucoup plus sélectif. Les enfants qui ne rentraient pas dans le programme étaient rapidement renvoyés de telle sorte qu'aucune violence n'ait lieu dans l'école. J'aimais ce havre de paix, même si les maitresses nous grondaient de temps en temps quand nous faisions des bêtises. Je n'aimais pas être punie et aller au coin devant tout le monde car ceci était tout simplement très humiliant. De ce fait, j'essayais au maximum de rester sage mais je me faisais tout de même beaucoup remarquée vu que j'avais toujours quelque chose de cassé. C'est d'ailleurs à l'école que je me faisais la plupart de mes blessures, en courant trop vite, en me prenant un arbre ou en tombant de la balançoire... C'est dans ce petit monde que j'ai grandi jusqu'à mes onze ans, âge auquel j'ai quitté l'école primaire pour le collège. J'avais des bonnes notes, un bon bulletin où les seules ombres étaient mes bavardages à répétition avec mes copines de classe. Mes parents étaient fiers de moi. Tout ce qui me manquait, c'était un petit frère ou une petite sœur, quelqu'un avec qui j'aurais pu jouer, mais mes parents ne m'ont jamais fait ce plaisir, ayant trop peur que l'accouchement se repasse comme la première fois. Maintenant que je suis plus vieille, je le comprends parfaitement mais enfant, cette solitude me pesait, même si ma mère m'autorisait souvent à inviter mes copines à la maison.

L'entrée au collège fut pour moi une période de changement radicale. Me retrouver avec des enfants plus vieux, alors que lors de ma dernière année en primaire, j'étais la plus vieille, cela me perturbait beaucoup. Les premiers jours se passèrent plutôt bien. Je me trouvais même une camarade de classe, malgré le fait que je ne connaissais personne. J'avais dû quitter ma petite école de banlieue pour entrer dans un collège de Londres, la grande ville. J'avais trente minutes de car tous les matins pour aller à l'école. C'était la seule solution pour que je restes dans le privé, ce qui était très important pour mes parents. Mon caractère sociale n'aida pas vraiment bizarrement. Les gens étaient déjà par petits groupes car ils se connaissaient d'avant mais moi, je venais de plus loin alors j'étais mise à part. Cet isolement me fit mal dans les premiers temps et mes résultats ne furent pas au beau fixe durant le premier trimestre. Ceci me valu les remontrances de mes parents qui demandèrent à ce que je changes de classe. J'étais contre mais au final, ce fut positif pour moi car seulement quelques jours plus tard, j'étais intégrée dans un petit groupe de 4 filles qui étaient comme moi, venue d'autre part. Nous restâmes ensemble durant toute la période du collège et le lieu devint bientôt un endroit où j'aimais aller. J'avais toujours aimé apprendre mais mon professeur de maths de deuxième année me fit particulièrement aimer cette matière qui restera ensuite ma favorite. La seule ombre au tableau de mon adolescence n'est cependant pas anodine. En effet, durant ma première année, je commençais à me rapprocher de mon voisin, garçon sans histoire qui avait deux ans de plus que moi mais avec qui j'adorais passer du temps. Il était toujours très gentil et me comprenait. Nous ne nous voyions que le weekend car il était dans un autre établissement que le mien mais à chaque fois, nous nous amusions comme des petits fous, jusqu'au moment où tout a dérapé. Nous étions allongé dans son lit à regarder la télévision, comme nous le faisions souvent et d'un coup, il se mit sur moi et commença à m'embrasser. Sur le coup, ce n'était pas vraiment désagréable vu que c'était la première fois que j'échangeais un baiser avec quelqu'un mais mes parents me l'avaient interdit, du fait de notre religion. Comme mon père m'avait souvent dit, nous étions au 21ème siècle et de ce fait, il ne ferait jamais comme mon grand père à me dire avec qui sortir et d'attendre le mariage pour embrasser, mais il m'avait cependant demander de lui en parler avant toute chose afin qu'on en parle. Là, je n'avais rien prémédité et pour cause, mon voisin n'était pour moi qu'un ami, rien de plus. Je ne savais pas comment réagir mais finalement, je le repoussais gentiment, lui expliquant que j'étais beaucoup trop jeune pour sortir avec quelqu'un. Il m'expliqua qu'il ne voulait pas sortir avec moi et que c'était juste pour essayer mais bizarrement, je ne voyais pas du tout cela de la même manière que lui. Il commença à vouloir aller plus loin et passa une de ses mains en dessous de mon tee shirt pour aussitôt la planter sur un de mes seins et de le tripoter. Je commençais à me débattre naturellement, n'aimant pas du tout la tournure que prenaient les événements. Il me baissa bientôt le pantalon avant de faire de même avec le sien. Etant beaucoup plus grand et lourd que moi, il m'était très difficile de le pousser mais j'arrivais encore à crier. Ses parents étaient absents. Il sortit bientôt son engin mais je fermais les yeux pour ne pas voir. J'avais peur mais je continuais à crier de toutes mes forces. Coup de chance pour moi, ma mère voyant l'heure tourner et ne me voyant pas rentrer, car oui j'avais seulement jusqu'à 16 heures pour sortir quand je n'avais pas fait mes devoirs, ce qui était le cas. Elle vint me chercher. Elle vit la scène par la fenêtre de la chambre et s'empressa de courir vers la porte qui était fermée à clé. Elle frappa de toutes ses forces dessus et cela suffit pour que mon voisin lâche prise le temps d'un instant. Je profitais de cet instant pour courir vers la porte. Il ne chercha pas à me rattraper. Je me lançais dans les bras de ma mère qui m'emmena aussitôt à la maison avant de nous enfermer à double tour. Après cet épisode, elle m'emmena voir un psychologue et nous avons porté plainte. Je ne sais pas ce qui est arrivé à mon voisin mais trois semaines plus tard, sa famille déménageait. J'étais donc pour sûr débarrassée de lui, même si j'aurais préféré savoir qu'il était en prison pour mineurs. Je fus parfaitement bien prise en charge, ce qui m'aide énormément. Ma mère m'autorisa à ne pas aller en cours pendant une quinzaine de jours et elle m'obligea à tout lui raconter dans les moindres détails afin de m'aider à mieux m'en sortir. Mon père fut également mis dans la confidence. Ce fut très difficile mais le temps passa et la douleur diminua peu à peu. Je ne dis jamais rien à mes amies sur mon absence mais je crois que cela a fait le tour de la classe, même si personne ne m'en parla. Le directeur avait dû vendre la mèche.

Après le collège, ça a naturellement été le moment du lycée. Là, je me suis tout de suite sentie à mon aise. Mes amies étaient dans le même établissement que moi, même si nous n'étions pas dans la même classe. L'épisode noir de mon adolescence était plus ou moins enfoui en moi et j'avais réussi à le surmonter au fil du temps. Il m'arrivait encore d'y penser, d'en faire des cauchemars mais dans l'ensemble, ça allait. Je continuais tout de même à aller voir un psychologue une fois par moi, cela me rassurait et j'avais demandé à mes parents de ne pas arrêter mes séances. Ils avaient été d'accord, même si cela leur coutait cher. Après tout, ils ne voulaient que le bien de leur fille unique. Lors de mon premier jour au lycée, mon père me prit entre quatre yeux pour que nous ayons une sérieuse conversation. Il me fit promettre que je ne dirais rien à ma mère car elle ferait sans doute une crise cardiaque si elle savait ce qu'il allait me dire. C'est à ce moment là qu'il me raconta sa rencontre avec ma mère et tout ce qu'il avait dû traverser pour la conquérir. Cela me toucha mais je ne savais pas vraiment où il voulait en venir. Au final, il m'expliqua ce qu'il m'avait toujours dit, que j'étais désormais en âge de faire mes propres choix. Il avait fait le choix d'entrer dans la religion, je pouvais faire celui d'en sortir si je le souhaitais et entre autres de sortir avec des garçons si je le désirais. J'acquiesçais, le remerciant. Néanmoins, ce qu'il ne savait pas c'est que depuis l'histoire, j'avais une peur bleue des garçons. Je me promenais sans cesse avec un couteau dans mon sac, ayant peur qu'on m'agresse et je fuyais dès qu'un homme m'approchait de trop près. Au fur et à mesure que je grandissais, je me rendis finalement compte que j'étais attirée par les femmes, chose sans doute dû à mon passé. En dernière année de lycée, j'étais d'ailleurs tombée sous le charme d'une de mes camarades de classe. Elle n'était malheureusement pas de ce bord, mais qu'est-ce que j'aurais donné pour avoir une chance avec elle... C'est d'ailleurs comme cela que je compris que j'aimais les femmes, ce que je me cachais bien de dire à mes parents qui feraient sans doute une crise cardiaque si je leur annonçais. Enfin, peut-être pas mon père qui comprendrait plus ou moins mais il finirait forcément par le dire à ma mère alors au final, je ne dis rien à personne. Les années passèrent encore. Mes parents s'étonnèrent que je ne parlais jamais de garçons mais je leur sortais toujours la même salade comme quoi j'étais encore trop traumatisée par ce qui s'était passé avec mon voisin pour penser à sortir avec quelqu'un. En réalité, j'avais eu quelques aventures avec des femmes, menant un peu plus loin que le simple baiser que l'on me conseillait depuis petite. Je savais très bien qui j'étais et je l'assumais pleinement en dehors de la maison.

J'ai fini mon lycée rapidement, entrant par la suite à l'université. A 21 ans, j'en ressortais avec une licence de mathématiques. Mes rapports envers le monde n'avaient pas changé pendant cette période et la seule chose qui fut importante fut ma première relation sérieuse. Elle dura un an et tout allait bien, jusqu'au jour où je me fis agresser dans la rue par un jeune homme. Je préférai mettre fin à ma relation, même si ma petite amie ne le comprit pas du tout et à partir de ce moment, je me mis au sport au maximum. Je voulais pouvoir me défendre seule et m'en tirer en cas de nouvelle agression. Ce jeune homme n'avait rien fait d'autre que me bousculer pour essayer de me voler mon téléphone portable mais pour moi c'était déjà trop. J'habitais toujours chez mes parents et n'avais pas dans l'optique de déménager pour l'instant. Je ne trouvais pas de boulot non plus mais je n'en cherchais pas plus que cela vu que je n'avais pas de facture à payer. Et puis finalement, un beau jour, une jeune femme vint m'interrompre pendant ma séance de gymnastique pour me parler de l'agence NWO. Elle m'expliqua que je ferais sans doute une bonne recrue et après une semaine de réflexion, je la recontactais pour lui dire que j'acceptais l'offre. C'est ainsi que j'eus mon premier vrai boulot, en dehors des jobs d'été étudiants. C'était il y a six mois et depuis, je travaille toujours pour eux. Ma vie est restée la même, jusqu'à il y a quatre mois, lorsque j'ai été dans cette maison de somnolence pour retrouver un peu de sommeil. J'étais tellement fatiguée à cause de mon travail qui me prenait tout mon temps... J'en avais réellement besoin. Ceci avait très bien marché et j'en étais réellement heureuse mais le seul problème fut que quelques jours plus tard, je commençais à entendre des voix d'hommes dans ma tête alors je me demande s'ils ne m'ont pas administré un remède qui rend fou.

Je m'étais levée tôt, comme d'habitude depuis la maison de somnolence. Je n'avais plus besoin de dormir douze heures d'affilées pour enfin avoir l'impression de ne plus être fatiguée. 7 heures suffisaient pour que le coup soit joué et j'en étais parfaitement satisfaite. Il allait falloir que j'aille au boulot mais cela ne pressait pas, il me restait encore deux heures devant moi. Je n'étais pas comme toutes ces filles qui avaient besoin de tant de temps pour se préparer et j'aurais donc le temps d'aller vérifier mes mails sur mon ordinateur tout en regardant la télévision. Chaque matin c'était le même rituel de toute manière alors ce n'était pas maintenant que j'allais changer tout cela. Mes parents dormaient encore. Il faudrait peut-être que je songe à trouver mon propre appartement d'ailleurs maintenant que j'ai un emploi stable. Ouais... On verra dans quelques mois, je ne suis pas vraiment pressée. Je pris un bol de céréales avec du lait que j'engloutis en moins de deux avant d'aller vers la salle de bains où je pris une bonne douche. C'était sans doute un des meilleurs moments de ma journée. Je m'habillais ensuite, avec les premiers vêtements qui me tombaient sous la main et m'assis devant la télévision. L'heure passa rapidement et je dus bientôt monter en voiture direction le boulot. La journée passa rapidement, rien d'extraordinaire ne se passa. Nous étions toujours en chasse de ces fameux powers mais bon, il était assez difficile de les repérer donc nous ne faisions pas coup tout les jours.

Vers 18 heures, j'avais pris congé de mes collègues, commençant à rentrer chez moi. C'est en plein milieu de la rue que les voix dans ma tête reprirent. J'arrivais à les oublier en journée vu que j'étais occupée mais dès que j'avais un moment de libre, elles revenaient au galop. C'était tout simplement insupportable ! « Hum, mattes moi les fesses de cette brune ! Trop bonne ! » Mais il ne parle pas de moi lui quand même ? Il faut vraiment que je retournes voir mon psychologue car je ne vais pas m'en sortir ! Fichu voisin, sors de ma tête ! Cette histoire de viol remonte à plus de dix ans et pourtant j'y penses encore, à croire que ça m'aura marqué à vie ! Je vis un bar au coin de la rue et je m'arrêtais devant la porte. L'alcool n'était sans doute pas la meilleure des solutions, surtout que c'était contraire à ma religion mais là, j'étais dans un car d'urgence ! J'ouvris la porte après un moment d'hésitation et allait directement vers le bar où le barman me regarda d'un mauvais oeil. « Bah dis donc, elle a l'air perturbé. » Et oui, c'était le cas et je ne pouvais pas vraiment faire autrement. Je lui commandais un rhum orange, autant y aller fort d'un coup ! Et dès que la boisson fut devant mes yeux, j'en bus une grosse gorgée. Je continuais ce petit rituel pendant quelques minutes, jusqu'à ce que quelqu'un vienne s'asseoir à côté de moi. Elle était plutôt jolie mais je ne la connaissais pas. Une bonne excuse pour faire connaissance non ?

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